Le Vietnam traverse actuellement une métamorphose urbaine sans précédent. Quatre programmes nationaux structurent cette révolution numérique: le développement des villes intelligentes durables (2018-2025, horizon 2030), la transformation numérique nationale (jusqu'en 2025, horizon 2030), la stratégie du gouvernement électronique vers le numérique, et le projet de données démographiques avec identification électronique. Ces initiatives forment désormais l’épine dorsale technologique de tous les services urbains du pays.

Les chiffres parlent d’eux-mêmes: à la mi-août 2025, 45 localités sur 63 exploitaient déjà des centres d’opérations intelligents. Ces plateformes centralisent la surveillance urbaine, de la circulation routière à la gestion environnementale. Et nous sommes désormais passés de l’expérimentation au déploiement à grande échelle.

Prenons l’exemple de Huê et sa plateforme Huê-S. Cette application transforme littéralement chaque citoyen en reporter urbain. Un problème dans votre quartier ? Quelques photos et commentaires suffisent pour alerter les services compétents. Le gouvernement local peut alors réagir en temps réel.

Dà Nang a remporté de nombreux prix internationaux tels que ASOCIO Smart City en 2019, Vietnam Smart City de 2020 à 2024 et Seoul Smart City 2023. Photo: VGP

À Dà Nang, l’application Danang Smart City va encore plus loin. Elle fonctionne comme un tableau de bord urbain de poche: consultation des transports publics, accès à des données ouvertes, évaluation des services municipaux... Tout est pensé pour être accessible, même aux utilisateurs les moins technophiles.

Nguyên Huu Phuong, un responsable au ministère de la Construction. Photo: VOV

La capitale n’est pas en reste avec iHaNoi, qui permet aux résidents de faire remonter leurs préoccupations directement aux autorités locales. Cette démocratie participative numérique change fondamentalement la relation entre citoyens et administration, comme nous l’explique explique Nguyên Huu Phuong, un responsable au ministère de la Construction.

“Nous ne développons pas des villes intelligentes pour faire joli avec la technologie. L’objectif, c’est d’améliorer concrètement la vie des gens. Ça change tout dans notre façon de planifier: on intègre dès le départ l’écologie, la durabilité, l’adaptation au climat. Et surtout, tout doit être transparent et accessible à tous sur les plateformes numériques”, nous dit-il.

Cette approche porte ses fruits: Hanoï et Hô-Chi-Minh-ville figurent désormais parmi les 100 villes intelligentes les plus performantes au monde selon l’indice des villes intelligentes 2024. Mais au-delà des prouesses technologiques, l’enjeu reste profondément humain.Vu Hoài Duc, maître de conférences au Département d’architecture, d’urbanisme et de sciences durables de l’Université nationale, le rappelle avec force.

“Une ville intelligente, ce n’est pas juste des capteurs et des applications. C’est avant tout une ville qui répond aux vrais besoins de ses habitants. La technologie nous aide à mieux gérer, à prendre des décisions plus rapidement, mais elle n’est qu’un outil au service du bien-être collectif”, nous explique-t-il.

Cette transformation numérique soulève néanmoins des questions cruciales. Comment garantir l’inclusion des populations les plus vulnérables - personnes âgées, habitants des zones rurales ? La standardisation des données, la cybersécurité et l’accessibilité universelle constituent les prochains défis majeurs. L’identité électronique VNeID, déjà adoptée par des millions de Vietnamiens, illustre à la fois le potentiel et les enjeux de cette révolution.

Le succès de cette transformation repose ad finem sur l’engagement de chaque citoyen: utiliser les services publics numériques, adopter les paiements sans contact, télécharger les applications locales... Chaque geste individuel contribue à construire les villes intelligentes de demain...