Tong Van Hia est entrain de fabriquer un Ta Dieu - Photo Duc Anh/VOV5 |
Dans la langue thai, «ta dieu» signifie «un
œil», mais le talisman portant le nom de «ta dieu» peut représenter un œil ou
sept yeux. C’est un objet de bambou tressé que les Thai accrochent au dessus de
leur porte ou plantent à même le sol pour chasser les mauvais esprits, nous
explique Tong Van Hia, un chaman exerçant dans la ville de Son La.
«J’ai plus de 80 ans maintenant et tout petit,
j’ai vu mes grands-parents et mes parents fabriquer des ta dieu. C’est un
talisman essentiel que nous utilisons à toutes les occasions, lors d’une sortie
en forêt, d’un emménagement, d’une cérémonie de culte, lorsqu’un membre de la
famille tombe malade ou qu’un bébé est né…»,
précise-t-il.
Le ta dieu à œil unique comprend neuf tranches
constituées chacune de six brins de bambou. Il renferme une feuille écrasée et
un petit morceau de charbon de bois. L’objet magique est accroché à l’aide d’un
brin de bambou ou tout simplement cloué au dessus de la porte ou sur le poteau
de départ de l’escalier conduisant dans la maison sur pilotis. Ce talisman à
œil unique a pour vocation de chasser les mauvais esprits au cas où un membre
de la famille tombe malade ou un bébé est né.
Le ta dieu à sept yeux, lui, ne dispose en
revanche qu’une seule tranche ronde constituée de douze brins de bambou. Une
tige de 40 cm permet de le planter au sol à l’occasion d’une cérémonie de culte
ou lors d’une nuit passée dans la forêt. Lorsqu’on emménage, ce talisman est
planté aux quatre coins de la nouvelle maison.
«J’ai appris à fabriquer le ta dieu à l’âge de
10 ans en imitant les seniors», raconte Tong Van
Hia. «Ne nous fiez pas à l’apparence! Tout le monde ne peut pas le
faire, encore moins les jeunes. Même parmi les vieux, quelques uns seulement
maîtrisent la technique. Mais nous le ferons volontiers pour qui nous le
demandera, gratuitement».
Un Ta Dieu à sept yeux - Photo Duc Anh/VOV5 |
L’installation du ta dieu nécessite la
présence d’un chaman pour lire la prière appropriée. Encore une fois, on fait
appel à Tong Van Hia.
«Avec la prière, nous ensorcelons le ta dieu
et le rendons effrayant pour les mauvais esprits. À leurs yeux, le talisman
serait tantôt comme un œil de dragon, un couteau ou un fusil», nous explique-t-il.
Pour les Thai, le ta dieu n’a rien de
superstitieux. Personne ne les oblige à l’installer et s’en procurer un n’a
rien de compliqué ni de coûteux. Mais ce n’est qu’après s’être assurés de sa
protection qu’ils se sentiront à l’aise. C’était le cas hier. C’est le cas aujourd’hui
et ce sera le cas sans doute pour de nombreuses générations à venir.