Un plateau d’offrandes est réparti en sept parts égales |
La cérémonie se déroule en présence du clan familial et d’autres villageois. Son ampleur et le moment choisi varient en fonction des moyens de chaque famille. Adrơng Y Blih, un Ede du district d’Ea Hleo, dans la province de Dak Lak, partage son expérience.
«J’ai trois enfants, du coup j’ai organisé trois cérémonies d’initiation. Les seules différences se trouvent au niveau des offrandes. Pour un garçon, on accroche une queue de porc sur un poteau et on lui remet un bouclier et une lance. Pour une fille, les offrandes sont présentées dans un panier et il n’y a pas de remise d’armes. C’est comme ça depuis des générations, on perpétue cette tradition en la transmettant aux générations suivantes», nous dit-il.
Y Sô Rian Kbuôr vit à Buôn Ma Thuôt, chef-lieu de la province de Dak Lak. À l'occasion de ses 20 ans, ses parents l’amènent chez le chaman pour discuter des préparatifs de sa cérémonie d’initiation. Le jeune homme ressent plusieurs émotions à la fois.
«J’ai été nerveux au début, puis heureux et excité à l’idée d’avoir bientôt droit à une cérémonie d’initiation. Ça veut dire que je suis suffisamment mature pour aider mes parents et m’occuper des affaires familiales», partage-t-il.
Le chaman, Y Wơn Niê Kđăm, dit aux parents d’Y Sô Rian de préparer un porc, sept jarres d’alcool et un plateau d’offrandes réparti en sept parts égales, contenant du porc, de l’alcool, du riz gluant cuit à la vapeur, des taros et des bananes bouillis.
Le chaman retire le bracelet en cuivre du poignet d’Y Sô Rian pour lui donner la liberté de décider de son avenir |
Le jour J arrive. Le chaman prend une longue bande de viande de porc crue allant du nez jusqu’à la queue. Avec sept lamelles de bambou, il accroche cette bande de viande sur un poteau au pied duquel est posée la plus grande jarre d’alcool. Les offrandes bien installées, le chaman lit ses prières pour informer les ancêtres de la tenue de la cérémonie et solliciter leur bénédiction. Par la suite, les gongs retentissent. Le chaman retire le bracelet du poignet d’Y Sô Rian en lisant ces prières:
«Je te retire ce bracelet en cuivre pour te donner la liberté de décider de ton avenir et de faire tes travaux champêtres. Tu es désormais une personne mature et en bonne santé capable de t’occuper des affaires familiales et de contribuer à la protection du village».
Ses prières terminées, le chaman accroche le bracelet sur un côté de la grande jarre. Puis il continue d’invoquer les divinités, les priant d’apporter au jeune homme santé, sérénité, courage, persévérance et intelligence, avant d’inviter celui-ci et les autres personnes présentes à déguster les plats présentés sur le plateau d’offrandes. Le jeune homme est le premier à s’en délecter, suivi de sa mère, de son père et des autres.
Le chaman remet un bouclier et une lance au jeune homme |
La partie rituelle continue quand le chaman délie les lamelles accrochant la bande de porc sur le poteau et descend celle-ci. Ensuite, il remet un bouclier et une lance au jeune homme qui va danser avec ces armes pour montrer sa force et son courage.
«En remettant au jeune homme ces armes, je lui confie la responsabilité de combattre pour protéger sa famille et ses proches. Désormais, il sera un homme fort sur lequel ses parents et ses proches pourront compter», explique le chaman.
La partie rituelle achevée, la famille et les invités se mettent à table, sirotent de l’alcool avec des pailles et jouent du gong pour célébrer un jalon crucial dans la vie d’un membre de leur communauté.