Les visiteurs découvrent l'apiculture avec les habitants locaux. Photo: Trân Hiêu/VOV Delta du Mékong |
À U Minh Ha, les forêts de cajeputier traversent leur période la plus difficile entre le neuvième et le dixième mois lunaire, avec de fortes pluies qui font partir les abeilles. Mais ces dernières réintègrent les lieux dès le onzième mois lunaire, quand le soleil revient. Jusqu’au quatrième mois lunaire de l’année suivante, c’est la saison apicole, que les habitants appellent «le printemps» d’U Minh Ha.
Profitant des journées ensoleillées, Huỳnh Vu Hoàng écorce et fait sécher les troncs de cajeputier de plus d’un mètre planté par sa famille. Après quoi, il les polit et les perce deux trous. Autrefois, les apiculteurs devaient porter les troncs sur leurs épaules à travers les roseaux pour entrer dans la forêt. Aujourd’hui, ils utilisent des bateaux pour les transporter par les canaux jusqu’au cœur de la forêt. Les apiculteurs ont chacun une parcelle de cajeputier. Ils repèrent les endroits propices, retirent les roseaux et installent les troncs pour que les abeilles y fassent leur nid. Pendant la saison des pluies, les abeilles continuent de construire leur nid et de produire du miel, mais en petite quantité.
“Après avoir installé mes troncs, je retourne sur place une semaine plus tard. Pour chaque ruche où les abeilles se sont installées, je note la date. Deux semaines après l’arrivée des abeilles, on peut commencer la récolte. Si la ruche fait au moins un mètre, on peut obtenir de 9 à 10 litres de miel pour la première récolte. La deuxième récolte est parfois encore plus abondante. Pour les suivantes, j’attends généralement 8 à 20 jours de plus. Pendant ce temps, je retire aussi une partie du miel des jeunes ruches, sinon elles deviennent trop lourdes. J’en profite également pour nettoyer soigneusement les ruches et préserver la qualité du miel”, nous raconte Huỳnh Vu Hoàng, apiculteur de son état.
L’apiculture a été reconnu patrimoine culturel immatériel national. Photo: Trần Hiếu/VOV Delta du Mékong |
L’apiculture telle qu’elle se pratique à U Minh Hạ a été reconnu patrimoine culturel immatériel national. Elle repose sur une longue observation des abeilles. Autrefois, celles-ci construisaient leurs nids sur la cime des arbres. Aujourd’hui, les apiculteurs suspendent des troncs dans la forêt en tenant compte du soleil et du vent, c'est-à-dire en s’appuyant sur un savoir-faire transmis de génération en génération. Selon la saison, ils ajustent l’exposition: en saison des pluies et du froid, deux tiers des troncs sont au soleil et un tiers à l’ombre pour que les abeilles aient assez de chaleur; en saison sèche et ensoleillée, seul un tiers des troncs est au soleil car trop de lumière gêne la nidification, comme nous l’explique Pham Duy Khanh, un apiculteur.
“Pour bien choisir et installer la ruche, l’apiculteur doit avant tout comprendre le comportement des abeilles. Lorsqu’il se déplace en forêt et repère un emplacement favorable, il le mémorise immédiatement. Le critère le plus important est la direction du vent: un vent fort fait bouger les roseaux, ce qui gêne les abeilles lorsqu’elles veulent se poser sur la ruche. La lumière du soleil joue aussi un rôle essentiel: selon l’expérience des apiculteurs, lorsque les rayons éclairent environ un tiers de la ruche, c’est souvent le signe que la ruche donnera beaucoup de miel ou que les abeilles y reviendront plus facilement”, nous dit-il.
Depuis 2015, la province de Cà Mau encourage le développement du tourisme communautaire dans la forêt d’U Minh Ha. Cette orientation a donné un nouvel élan au métier d’apiculteur, lui permettant de se revitaliser et de se développer fortement. À la saison des fleurs de cajeputier, de nombreux visiteurs accompagnent les apiculteurs pour observer les ruches et suivre, de leurs propres yeux, chaque étape de la récolte du miel. Ils peuvent mesurer, par la même occasion, l’attachement profond des habitants d’U Minh Ha à la forêt et à la nature.
Dans la forêt d’U Minh Hạ, de nombreux sites d’écotourisme ont fait de l'apiculture leur produit phare. Photo: Trần Hiếu/VOV Delta du Mékong |
Depuis l’essor du tourisme, le prix du miel s’est nettement amélioré, offrant aux habitants un revenu plus stable. C’est en tout cas ce que nous laisse entrevoir Pham Van Ngot, un apiculteur.
“Dès qu’un tronc est en place, les abeilles affluent en grand nombre. Aujourd’hui, quand j’installe une quarantaine de troncs, plus de vingt accueillent des abeilles. Parfois la récolte est modeste, parfois abondante, mais au final cela rapporte mieux que l’agriculture. C’est un métier assez stable”, nous dit-il.
À U Minh Ha, depuis des générations, les forêts verdoyantes sont préservées pour que les abeilles y produisent leur miel parfumé. Chaque ruche-tronc installée est le fruit des efforts des apiculteurs sous le soleil et la pluie, mais elle porte aussi l’amour et les rêves de vie meilleure.