Photo d'illustration
|
Selon les statistiques publiées par le département de finance des entreprises du ministère des Finances, 61% des entreprises à capitaux étrangers au Vietnam étaient déficitaires en 2016. Ce poucentage variait entre 44% et 51% de 2012 à 2015. Une année déficitaire reste chose courante pour une enterprise opérationelle dans une économie de marché. Cependant, lorsqu’une société aux résultats annuels déficitaires durant plusieurs années consécutives élargit ses activités dans le pays, cela laisse entrevoir une manipulation fiscale. Cette entreprise se retrouvera donc dans le viseur des administrations fiscales pour sa manipulation des prix de transfert.
Dernièrement, plusieurs multinationales ont été pointées du doigt. Metro Vietnam avait échappé aux contrôles fiscaux pendant 12 années consécutives jusqu’à ce qu’une enquête révèle l’utilisation de cette pratique. Un redressement fiscal a été entrepris rapportant à l’Etat plus de 507 milliards de dongs. Plus récemment, Grab a annoncé des pertes cumulées excédant 938 milliards de dongs, soit un chiffre bien supérieur à son capital social de 20 milliards de dongs.
La pratique de prix de transfert évolue de manière complexe et sophistiquée au Vietnam. Certaines multinationales conçoivent leurs montages financiers grâce à des transactions intragroupes avec leur succursale basée au Vietnam afin de transférer légalement des bénéfices dans notre pays afin d’alléger leur facture fiscale globale. Selon Bui Ngoc Tuân, directeur adjoint de Deloitte Vietnam, un cabinet de conseil fiscal, le taux d’imposition sur les sociétés au Vietnam est plus faible que dans d’autres pays de la région, ce qui facilite les prix de transfert.
« En effet, le taux d'imposition des sociétés au Vietnam qui est de 20% figure parmi les plus bas d’Asie du Sud-Est, seulement devancé par Singapour », explique-t-il. « A cela s’ajoutent les exonérations ou les réductions fiscales importantes dont les coentreprises bénéficient régulièrement en fonction de leur domaine d’activités et du lieu où elles s’implantent. »
Nguyên Thi Lan Anh, chef adjointe de la Direction de contrôle relevant de l’administration fiscale du ministère des Finances, les prix de transfert au Vietnam revêtent plusieurs formes: les ventes de biens corporels ou d’actifs incorporels, les prestations de services, le partage de certains frais communs comme les frais d'administration ou encore les redevances de concession de brevets ou de marques… Les autorités fiscales chercheraient donc des mesures plus appropriées pour lutter contre la fraude fiscale liée aux prix de transfert. Parallèlement à un durcissement de la législation, la mise en place d’une banque de données des contribuables sera nécessaire, d’après Mme Lan Anh.
« Nous sommes en train de créer une base de données des contribuables pour faciliter la lutte contre les prix de transfert », a-t-elle souligné. « Nous allons nous rapprocher des ministères, des organes compétents vietnamiens et étrangers pour un contrôle plus efficace sur ces pratiques. »
Le Vietnam doit par ailleurs réviser sa politique fiscale accordée aux entreprises à capitaux étrangers de manière à s’assurer qu’elle accompagne les entreprises bénéficiaires tout en évitant la manipulation des prix de transfert.
Le prix de transfert se
définit comme le prix attaché à une transaction ayant lieu entre des sociétés
d'un même groupe mais situées dans des États différents. Cette pratique est
susceptible d'être utilisée par les multinationales afin de permettre l'imposition
de leurs bénéfices dans des pays à bas niveau de taxation, sans tenir compte du
lieu où les activités économiques sont réalisées.