Le président
de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker - Photo THX/TTXVN
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Les États-Unis ont mis à exécution leur menace. Après l’expiration d’une période
d’exemption de deux mois, ils ont effectivement rehaussé les droits de douane
sur l’acier et l’aluminium européens.
C’est
en mars dernier que Washington avait décidé de cette hausse. L’administration
Trump avait cependant consenti à certains partenaires, dont l’Union européenne,
une période d’exemption, pour des négociations supplémentaires, jusqu’au 1er
juin.
Manifestement,
ces négociations n’ont rien donné. La tension commerciale entre les deux
grandes puissances a donné lieu à des débats houleux lors de la conférence des
ministres des Finances, du Développement et des gouverneurs de banques
centrales du G7, qui s’est ouverte jeudi au Canada.
L’Amérique
d’abord…
En
taxant lourdement ses alliés européens, le président Donald Trump a prouvé que
son slogan de campagne «America first» (l’Amérique d’abord) n’avait rien d’une
formule creuse, quitte à ce que les États-Unis se mettent à dos l’un de leurs
plus anciens et plus proches alliés. Le locataire de la Maison Blanche justifie
sa politique par la nécessité de veiller à la sécurité nationale et de protéger
les producteurs américains. L’enjeu est de taille. Les États-Unis sont en effet
le plus grand importateur d’acier au monde puisqu’ils en importent quatre fois
plus qu’ils en exportent. Quant à l’aluminium, la quantité importée par les États-Unis était cinq fois supérieure à celle produite sur leur territoire, en
2016. D’après le secrétaire américain au Commerce, Wilbur Ross, Washington
souhaite pouvoir reprendre les négociations avec l’Union européenne, tant il
reste de problèmes à résoudre.
En
réalité, les différends commerciaux entre les États-Unis et l’Union européenne
ne se limitent pas au dossier acier-aluminium. L’année dernière, la valeur des
exportations européennes d’acier et d’aluminium vers le marché américain
n’était que de 6 milliards de dollars. Six sur une valeur totale de 300
milliards de dollars, toutes exportations européennes confondues. Ce qui veut
dire que la part de l’acier et de l’aluminium dans le déficit commercial
enregistré par les États-Unis à l’égard de l’Europe est minime, et donc, que cet
acte protectionniste décidé par le président Trump à l’encontre de ces produits
n’est qu’un prétexte. Sans doute le chef de la Maison Blanche veut-il tout
simplement montrer à ses électeurs jusqu’où il pourra aller pour défendre son
slogan «l’Amérique d’abord».
…
une liberté commerciale sérieusement compromise ensuite
Aux
yeux des Européens, en rehaussant ces tarifs douaniers, les États-Unis tournent
le dos à leurs partenaires proches. Et l’Union européenne n’aura pas d’autre
choix que de protéger ses industries, ses emplois et ses intérêts. Le président
de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker, a même déclaré que l’Union
européenne saisirait l’Organisation mondiale du Commerce (OMC) pour arbitrer ce
différend. En attendant, l’Union européenne se réservera le droit de prendre
des mesures de représailles égales et conformes aux dispositions de l’OMC.
Certains
analystes estiment que Donald Trump pourrait ignorer, voire se retirer de
l’OMC. Mais le pire scénario serait que son comportement déclenche un effet
domino. D’autres pays pourraient en effet prendre des mesures commerciales de
même type sous l’enseigne de la sécurité nationale.
Les
tensions actuelles entre les États-Unis et l’Union européenne pourraient bien
dégénérer en une guerre économique totale dans un avenir proche.
Quels
sont donc les intérêts que cette hausse des droits de douane pourrait apporter
aux Américains? Bien des analystes y voient plus d’inconvénients que
d’avantages. D’après eux, cette décision fera augmenter le prix des marchandises,
au détriment des consommateurs. Les économies américaine, européenne et
mondiale en pâtiront. Déjà, plusieurs entrepreneurs américains dans le secteur
énergétique craignent que des importations plus chères d’acier et d’aluminium
ne mettent à mal leurs projets d’oléoduc, de forage et de raffinerie
pétrolière.
L’Iran,
l’acier, l’aluminium… Les pommes de discorde se multiplient entre l’Union
européenne et les États-Unis. Leur alliance traverse la pire crise qu’elle
n’ait jamais connue depuis longtemps.