De la fumée monte sur un site de bataille au Soudan, le 15 avril. Photo: Reuters |
À la suite d’une longue montée de tensions, de violents combats ont éclaté samedi 15 avril à Khartoum et dans plusieurs villes du pays entre les forces du général al-Bourhane, à la tête de l’armée régulière soudanaise, et celles du général ‘Hemetti’, chef de la milice paramilitaire FSR. Les FSR ont dit avoir pris le contrôle de l’aéroport de Khartoum, du palais présidentiel et d’autres infrastructures clefs, ce que l’armée régulière a nié. Autant d’affirmations contradictoires rendant impossible de savoir qui contrôle quoi pour le moment.
Que s’est-il passé?
Ces affrontements sont le dernier épisode d’une guerre entre Abdel Fattah al-Bourhane, chef des armées, et son ex-adjoint, Mohamed Hamdane Dagalo, dit ‘Hemetti’, l’actuel leader des FSR, un puissant groupe de mercenaires. Fondées en 2003 sous le régime d’Omar el-Béchir sous forme d’une milice paramilitaire, au fil des années, les FSR sont devenues une force puissante et autonome de l’armée.
En 2019, après un coup d’État contre Omar el-Béchir, le général al-Bourhane a dirigé le conseil souverain, censé superviser la transition démocratique. En 2021, Hemetti s’est associé avec al-Bourhane pour renverser le gouvernement civil et prendre le pouvoir.
Aujourd’hui, ces ex-alliés se font la guerre, parce que les deux parties ne parviennent pas à s’entendre sur le processus d’adhésion des FSR à l’armée régulière, conformément à un accord conclu en 2022 sur la transition démocratique au Soudan, initié par l’Arabie saoudite, les Émirats arabes unis, les États-Unis et l’ONU. Les FSR souhaitent que le processus de transition puisse se faire sur une durée de 10 ans et revendiquent la constitution d’un gouvernement civil. L’armée, quant à elle, réclame le contrôle total et compte terminer le processus en 2 ans. Les désaccords sont tels que les parties ont reporté sine die la signature d’un accord final, qui était prévue le 6 avril dernier. C’est la goutte d’eau qui fait déborder le vase.
De la fumée monte à Khartoum, au Soudan, le 15 avril. Photo: AP |
Les réactions internationales
Craignant une «contagion» dans la région, l’Égypte et le Tchad ont décidé de fermer leurs frontières avec le Soudan. Les agences aériennes d’Égypte, d’Arabie saoudite et du Qatar ont quant à elles annulé leurs vols à destination du Soudan.
L’Union africaine, la Ligue arabe, l’Autorité intergouvernementale pour le développement (AGAD) ont appelé les parties concernées à la retenue et au dialogue pour tenter d’esquisser une issue rapide à cette crise. Le Conseil de sécurité de l’ONU s’est réuni ce lundi en urgence à New York pour discuter de la situation au Soudan. Le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, a réclamé un arrêt immédiat des violences.
Dans la foulée, les contacts diplomatiques se sont intensifiés. L’Égypte, grand voisin influent, a annoncé avoir discuté de la situation avec l’Arabie saoudite, le Soudan du Sud et Djibouti, trois autres acteurs importants au Soudan, ainsi qu’avec Paris.
Sur le terrain, le seul accord obtenu entre les deux protagonistes consiste en l’ouverture d’un fragile couloir humanitaire d’une durée de trois heures par jour pour les urgences. Fragile puisque chacune des deux parties se réserve le droit de riposter à toute trangression de l’autre. Et pour ne rien arranger, plane le spectre d’ingérences étrangères susceptibles de complexifier une situation déjà chaotique, ce à quoi le Conseil de sécurité et de paix de l’Union africaine s’est déclaré fermement opposé.