Le président français Emmanuel Macron lors de la Conférence sur la sécurité de Munich. Photo: EPA |
La vision française d’une nouvelle puissance militaire européenne
Depuis la sortie du Royaume-Uni de l'Union européenne, la France est le seul pays de l'Union Européenne (UE) à disposer de l'arme atomique. A Munich, Emmanuel Macron a évoqué les forces nucléaires de l’Europe et rappelé que pendant la Guerre froide, le bouclier anti-missile européen était dirigé essentiellement par les États-Unis. «Nous avons besoin d’une Europe de la défense plus forte», a affirmé le locataire de l’Élysée.
Le discours du président français fait suite aux propositions de créer une «Union de sécurité et de défense de l’Europe» énoncées plus tôt par son homologue allemand Frank-Walter Steinmeier et le chef de la diplomatie allemand Heiko Mass. La ministre allemande de la Défense, Annegret Kramp-Karrenbauer, a d’ailleurs estimé que Berlin devrait adopter une politique sécuritaire plus forte.
Le mécontentement de l’OTAN
Cependant, l’idée d’une Europe « puissance militaire » déplaît fortement à l’OTAN.
Son secrétaire général Jens Stoltenberg s'oppose à la création d'une armée européenne et rappelle que l’OTAN dispose déjà d’une dissuasion nucléaire en Europe qui garantit la sécurité en Europe. Selon lui, une plus grande responsabilité de l’Europe dans le maintien de sa sécurité ne signifie pas pour autant qu’elle peut le faire sans les États-Unis. De ce fait, les efforts de l’Europe en vue d’une plus grande autonomie sécuritaire pourraient éroder les relations transatlantiques et compromettre la force de l’OTAN.
De son côté, Emmanuel Macron a affirmé que ce projet n’a pas pour objectif de remplacer l’OTAN mais de renforcer la capacité sécuritaire de l’Europe sans devoir dépendre des décisions des États-Unis.
Depuis l’arrivée au pouvoir de Donald Trump, les relations entre l’Europe et les États-Unis se sont très nettement détériorées. Alors que les deux partenaires ont été côte à côte dans de nombreuses opérations importantes, leurs points de vue sur plusieurs questions stratégiques sont désormais divergents. Les États-Unis n’ont de cesse d’exiger que les pays européens partagent le fardeau financier de l’OTAN et la plupart des rencontres entre Donald Trump et les dirigeants européens dans le cadre de l’alliance se sont soldées par des échecs. L’Europe se sent de son côté irritée par les pressions que les États-Unis exercent sur elle, par le retrait de Washington de l'Accord de Vienne sur le nucléaire iranien (JCPOA) et du Traité sur les forces nucléaires à portée intermédiaire (FNI), ainsi que par l’attitude de la Maison Blanche quant aux questions relatives au multilatéralisme. L’Europe s’inquiète aussi du retrait progressif et du manque d’implication des États-Unis dans la sécurité de l’Europe.
La volonté de la France et de l’Allemagne, les deux principaux moteurs de l’Europe, de donner aux 27 une plus grande autonomie sécuritaire semble donc tout à fait légitime. Reste à savoir si cette Europe de la défense deviendra réalité et comment.