Affrontements entre policiers et émeutiers à Marseille, le 30 juin. Photo: AFP/TTXVN |
Un événement déclencheur
Le 27 juin 2023, Nahel Merzouk, un adolescent franco-algérien de 17 ans, a été tué par un policier, à la suite d’un refus d’obtempérer. Comme l’a noté le procureur de Nanterre, Nahel conduisait, sans permis, sur la voie réservée aux bus, d’où l’intervention de la police.
Une vidéo de l’incident circulant sur les réseaux sociaux montre que l’un des policiers, debout, accoudé sur le pare-brise, tenait le conducteur en joue avec son pistolet. Quand le conducteur a tenté de redémarrer, le policier a tiré depuis le côté du véhicule. La voiture a terminé sa course quelques dizaines de mètres plus loin, encastrée dans un poteau. Touchée au bras et au thorax, la victime est décédée quelques minutes plus tard.
L’auteur du coup de feu a été mis en examen et ensuite placé en détention provisoire pour homicide volontaire. Il a expliqué vouloir éviter une course-poursuite dangereuse pour le public, Nahel étant connu des services de police pour conduite sans permis et infractions répétées au code de la route.
La nuit même, des milliers de personnes, parmi lesquelles la mère de la victime, ont organisé une marche blanche dans les rues de Nanterre avec des slogans réclamant justice. Les rassemblements ont aussi eu lieu devant le siège de la police de Nanterre et dans une dizaine de villes. Ensuite, un peu partout en France, les grandes villes se sont embrasées et pendant quelques jours, les violences se sont multipliées, avec leur cortège de voitures brûlées, de bâtiments publics incendiés et de magasins dévalisés.
La vidéo de l’incident, qui tourne en boucle sur les réseaux sociaux, a ravivé les tensions entre la police et les jeunes des quartiers populaires, mais aussi la colère liée aux violences policières et à un racisme supposé au sein des forces de l’ordre: une situation qui n’est pas sans rappeler le mouvement Black Lives Matter déclenché après la mort de George Floyd, aux États-Unis.
Mais cette flambée de violences rappelle surtout celle de 2005. C’était après la mort de deux adolescents, Zied et Bouna, dans un transformateur électrique alors qu’ils étaient poursuivis par les forces de l’ordre. Les émeutes avaient alors duré trois semaines et le président Jacques Chirac avait dû décréter l’état d’urgence.
Réaction du gouvernement
«Inexplicable» et «inexcusable», tels sont les mots employés par le président Emmanuel Macron pour qualifier la mort de Nahel. «Rien ne justifie la mort d’un jeune», a-t-il aussi affirmé. Le chef de l’État a annulé sa visite en Allemagne, prévue du 2 au 4 juillet, afin de résoudre la crise, mais a refusé de décréter l’état d’urgence. Emmanuel Macron a appelé les parents à ne pas laisser leurs enfants descendre dans la rue, et pointé du doigt les réseaux sociaux Snapchat et TikTok, vecteurs, selon lui, d’incitations à la violence…
Le gouvernement a dû mobiliser 45.000 policiers et gendarmes et déployer des véhicules blindés pour empêcher une escalade de violences. Le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, a ordonné la fermeture des services de bus et de trams après 21h à partir du 30 juin.
Les conséquences
En une semaine, il y a eu au total quelque 3.200 interpellations de personnes majeures et 700 membres des forces de l’ordre blessés. Sur le plan matériel, 5.000 véhicules ont été incendiés, 1.000 bâtiments brûlés ou dégradés, 250 gendarmeries ou commissariats attaqués, et l’on recense une dizaine de milliers de feux de poubelles. Par ailleurs, selon le ministère de l’Économie, au moins 250 agences bancaires, 250 bureaux de tabac et 200 centres commerciaux ont été détruits.
En écho à la situation en France, suite à des appels sur les réseaux sociaux, des violences ont éclaté à Lausanne, en Suisse, et provoqué des déprédations à des commerces. 7 personnes ont été interpellées et une enquête a été ouverte.
Suite à une attaque contre un bus transportant 31 touristes chinois le 30 juin à Marseille, le consulat de Chine a envoyé une note au gouvernement français, exigeant que celui-ci protège les citoyens chinois et leurs biens.
Plusieurs pays ont aussi exprimé leur préoccupation face aux violences urbaines en France et publié un avis pour enjoindre à leurs ressortissants d’annuler ou de reporter leurs déplacements en Hexagone. Le porte-parole du ministère des Affaires étrangères iranien, Nasser Kannani, a appelé les Iraniens à limiter les voyages en France et recommandé aux ressortissants iraniens en France d’éviter les zones en tension.
Même si la situation semble s’apaiser un peu, la tension est encore palpable. Le président Emmanuel Macron doit recevoir ce mardi les maires de 220 communes victimes «d’exactions» à travers le pays. Une consultation des élus locaux lors de laquelle le chef de l’État souhaite débuter un travail minutieux pour comprendre en profondeur les raisons qui ont conduit à ces événements, a indiqué l’Élysée.