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Risque d'accentuation des tensions
La crainte exprimée par plusieurs pays de l’Union européenne est donc devenue réalitée. La représaille chinoise cible précisément le secteur agricole, un secteur important et particulièrement sensible pour certains pays de l’Union. Cependant, d’autres produits tels que les biens de consommation de luxe, le vin, le chocolat, les meubles haut de gamme et les véhicules de grande puissance en provenance d’Europe pourraient également être visés.
Jens Eskelund, président de la Chambre de commerce européenne en Chine, a mis en garde contre une guerre commerciale à grande échelle qui nuirait à la fois à l’UE et à la Chine, deux superpuissances commerciales mondiales. Les constructeurs automobiles allemands sont particulièrement préoccupés par ce scénario, comme l'indique Simon Schutz, porte-parole de l’Association allemande de l’industrie automobile:
«Notre position est toujours claire. L’industrie automobile allemande n’est pas favorable à une imposition de surtaxes sur les véhicules électriques chinois car ce n’est pas une bonne mesure pour résoudre les différends entre les deux parties. Une hausse des droits de douane pourrait être le début d’un conflit commercial, causant des dommages aux fabricants des deux parties. Il n’y a jamais de relations gagnant-gagnant lorsqu’il y a un conflit commercial», a-t-il indiqué.
L’avenir de l’industrie des véhicules électriques en Europe
Même si la plupart des experts estiment que ni Bruxelles ni Pékin ne souhaitent une guerre commerciale, la hausse des droits de douane imposée par la Commission européenne sur les véhicules électriques produits en Chine aura également des répercussions majeures. L’UE interdira toutes les voitures équipées de moteurs à combustion interne à partir de 2035. Par conséquent, la promotion des véhicules électriques constitue l’une des priorités stratégiques du Pacte vert de l’UE. Cependant, à mesure que les taxes sur les véhicules électriques importés de Chine augmentent, les prix de ces véhicules seront également plus élevés. Cela pourrait ralentir le processus d’élimination des véhicules à combustibles fossiles en Europe, affectant ainsi l'objectif stratégique ultime de neutralité carbone de l’UE en 2050.
De nombreuses organisations de protection de l’environnement en Europe sont sceptiques quant à l’impact de cette décision sur la mise en œuvre d’autres objectifs de l’UE en matière d’environnement et de changement climatique.
La hausse des droits de douane européens sur les importations de véhicules électriques chinois aura également des répercussions économiques. Dans un communiqué publié la semaine dernière, Volkswagen, le plus grand groupe constructeur automobile européen, a déclaré que cette décision soutient le protectionnisme et l’isolationnisme. De l’avis de Joe Mazur, expert du groupe Trivium China, il est difficile d’utiliser les barrières tarifaires pour bloquer la vague d’entrée de véhicules électriques chinois en Europe.
«Les droits de douane que l’UE entend imposer aux véhicules électriques chinois se situent dans la fourchette prévue. Par conséquent, malgré des impacts, il existe encore des opportunités pour les véhicules électriques chinois sur le marché européen. Au cours des dernières années, les constructeurs chinois de véhicules électriques ont proposé des prix très compétitifs. Ainsi, lorsque les nouveaux tarifs seront appliqués, ils devront réduire leurs bénéfices ou augmenter leurs prix, ou les deux», a-t-il noté.
D’après le groupe de recherche et d’analyse économique Rhodium, même avec un taux d’imposition de 30%, le plus grand constructeur chinois de véhicules électriques, BYD, restera rentable en Europe, tandis que le modèle 3 du constructeur américain Tesla, fabriqué en Chine, subira des pertes.