Le changement climatique et les conflits exacerbent la pauvreté…
Les enfants attendent pour recevoir une aide alimentaire à Rafah, dans la bande de Gaza. Photo: THX/AVI |
Le monde traverse une nouvelle période d’instabilités, où le changement climatique et les conflits s’imbriquent et exacerbent la faim et la pauvreté. Ce constat fait hélas l’unanimité, aussi bien auprès des dirigeants de l’ONU que de ceux des grandes organisations internationales. Comme l’a fait observer Antonio Guterres, le secrétaire général de l’ONU, les conflits obligent des millions de personnes à se déplacer et détruisent les infrastructures agricoles. Quant au changement climatique, il s’accompagne de phénomènes météorologiques extrêmes - sécheresses, inondations, montée du niveau de la mer - qui mettent en péril les exploitations agricoles et les pratiques traditionnelles.
Antonio Guterres, le secrétaire général de l’ONU. Photo: AVI |
Statistiques du Programme alimentaire mondial (PAM) à l’appui, le patron de l’ONU a noté une augmentation progressive de la famine aiguë à l’échelle mondiale ces dernières années.
Simon Stiell, le secrétaire exécutif de la Convention-cadre de l’ONU sur le changement climatique. Photo: AVI |
Fin 2023, plus de 330 millions de personnes se trouvaient ainsi dans cette situation critique… Un autre constat alarmiste que partage Simon Stiell, le secrétaire exécutif de la Convention-cadre de l’ONU sur le changement climatique.
«Il y a quelques années encore, le monde était persuadé qu’il était possible d’éradiquer la faim, mais aujourd’hui, une personne sur dix souffre de faim chronique. Ce chiffre est inacceptable. Si le dérèglement climatique continue de s’aggraver, la situation ne fera qu’empirer, non seulement en termes d’insécurité alimentaire, mais également en termes de conflits», alerte-t-il.
Dans son Rapport mondial sur la crise alimentaire de 2023, l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) pointe du doigt le changement climatique et les conflits comme étant des menaces directes pour la sécurité alimentaire et plus généralement pour la sécurité de la planète. Sa directrice générale adjointe, Beth Bechdol, n’hésite plus à tirer la sonnette d’alarme.
«Nous avons entendu à maintes reprises qu’il ne pouvait y avoir de sécurité alimentaire sans paix et qu’il ne pouvait y avoir de paix sans sécurité alimentaire… Nous avons pu constater que les conflits généraient de la famine et de la malnutrition: ce n’est pas un hasard si la moitié des personnes souffrant de la faim dans le monde vivent dans des zones affectées par des conflits...», note-t-elle.
Pour Beth Bechdol, il n’est que de considérer la crise russo-ukrainienne ou les violences dans la bande de Gaza. Dans le premier cas, les pertes imposées au système agricole ukrainien s’élèvent à 40 milliards de dollars. Dans le second, 2,2 millions de Gazaouis sont confrontés à la faim.
… et il y a péril en la demeure
Dans ce contexte d’insécurité alimentaire croissante, l’ONU appelle les États à agir promptement. Pour son secrétaire général, Antonio Guterres, la faim et les conflits vont toujours de pair.
«Si nous restons inactifs, la situation ne fera qu’empirer. Les conflits se multiplient, la crise climatique s’intensifie à mesure que les émissions de gaz à effet de serre continuent de croître. Nous devons agir dès maintenant pour rompre le cercle vicieux changement climatique-conflits-insécurité alimentaire», nous dit-il.
Pour le ministre des Affaires étrangères guyanien, Hugh Hilton Todd, cette prise de conscience ne suffit pas. Le Conseil de sécurité des Nations unies doit rapidement adopter une stratégie à long terme pour édifier un nouveau système alimentaire mondial durable, estime-t-il.
Beth Bechdol prône quant à elle l’instauration d’un nouveau système agricole, incluant l’ensemble du processus de production alimentaire, de la culture à la conservation.
Lors d’une conférence internationale tenue ce mardi à Rome, le président du Fonds international de développement agricole des Nations unies, Alvaro Lario, a appelé à investir davantage dans l’innovation agricole. Environ 3 milliards de personnes vivent dans les zones rurales des pays en développement et la plupart d’entre elles pratiquent une agriculture à petite échelle, a-t-il rappelé, avant de noter que ces personnes ne reçoivent que 1% des financements climatiques mondiaux... Les agriculteurs, qui sont parmi les premières victimes du changement climatique, doivent être mieux armés en termes de finances et de technologies, a-t-il plaidé…