Vân Mai, gardienne des rythmes du ca trù

Kim Liêu
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(VOVWORLD) - Seize ans après avoir été inscrit sur la Liste du patrimoine culturel immatériel nécessitant une sauvegarde urgente, le ca trù (chant des courtisanes) retrouve une nouvelle jeunesse. Partout dans le pays, les clubs de ca trù redoublent d’activité, contribuant à préserver et à faire vivre cet art ancestral tout en lui insufflant une nouvelle vitalité. Parmi les figures marquantes de ce mouvement, l’artiste émérite Vân Mai, présidente du club de ca trù “Bích Câu Đạo Quán” à Hanoï, se distingue par son engagement et ses efforts inlassables pour transmettre et faire rayonner cette forme d’art unique du patrimoine vietnamien.

Vân Mai, gardienne des rythmes du ca trù - ảnh 1L’artiste émérite Vân Mai et les membres du club de ca trù “Bích Câu Đạo Quán”. Photo: Kim Liễu/VOV5

Originaire de l’ancienne province de Thai Binh, Vân Mai a nourri très tôt un amour profond pour le ca trù, bien que personne dans sa famille ne se soit tourné vers l’art. Dotée d’une voix pure et limpide, à la fois douce et précise, elle a, grâce à un travail constant, un apprentissage en grande partie autodidacte et une passion inébranlable, réussi à maîtriser progressivement les airs les plus complexes de ce répertoire.

Elle se souvient que, dans ses premières années, apprendre le ca trù fut un véritable défi, exigeant patience, rigueur et persévérance. 

“Les mélodies du ca trù se distinguent par leur beauté et leur élégance. Une fois la technique du souffle maîtrisée, chaque mot, chaque phrase semble porté par toute l’émotion de l’artiste. Art traditionnel emblématique du Vietnam, le ca trù mérite d’être transmis aux jeunes générations afin qu’elles en assurent la préservation et la vitalité”, nous dit-elle.

“En 1995, j’ai entendu pour la première fois la voix captivante et pleine de puissance de l’artiste de ca trù Quach Thi Hô sur les ondes de la Voix du Vietnam. Auparavant, j’avais chanté du chèo (théâtre populaire) et du châu văn (chant des médiums), mais en écoutant les airs de ca trù, j’en suis tombée amoureuse et c’est ainsi que j’ai lié mon destin à cet art. Il était cependant très difficile de trouver un maître, car les artistes que j’admirais étaient déjà âgés. Pendant de nombreuses années, j’ai étudié auprès de différentes chanteuses de ca trù et écouté les anciens enregistrements datant des années 1930 à 1945. En 2006, j’ai commencé à apprendre en autodidacte et à participer au programme “Nuit du ca trù” organisé par l’Institut de Musique à l’Opéra d’Hanoï. À cette occasion, mon interprétation a été particulièrement bien accueillie par les chercheurs”, raconte-t-elle.

Vân Mai, gardienne des rythmes du ca trù - ảnh 2Les membre du club "Bích Câu Đạo Quán" aux côtés d’un groupe de touristes canadiens, lors d’une représentation de ca trù. Photo: Kim Liễu/VOV5

Après des années de travail acharné, Vân Mai maîtrise aujourd’hui de nombreux modes du ca trù. Elle a également réussi à faire revivre le chant traditionnel “Non mai hồng hạnh”, disparu depuis 70 ans. Selon elle, ce chant se distingue par sa technique particulière de retenue du souffle et de staccato.

“Contrairement au chèo ou au quan họ, le staccato du ca trù se projette depuis le nez plutôt que la gorge. Les anciens disent que ce chant est à la fois monophonique et polyphonique. L’interprète articule chaque syllabe avec précision, puis comprime le souffle pour faire jaillir chaque note avec éclat”, précise-t-elle.

Passionnée par le ca trù et désireuse de préserver cet art traditionnel, Vân Mai a créé en 2015 le club de ca trù “Bích Câu Đạo Quán”, au 14 rue Cát Linh, à Hanoï. Le lieu est devenu à la fois un espace de rencontre pour les amateurs de ca trù et un centre de formation pour les jeunes talents, parmi lesquels Nguyên Hông Hanh, artiste de chèo actuellement en apprentissage au sein du club.

“Le ca trù est un art musical traditionnel à la fois raffiné et savant. Chaque poème, chaque chant recèle une profondeur de sens remarquable. Madame Mai fait preuve d’une grande passion et d’un dévouement sans réserve. Elle nous transmet tout ce qu’elle sait. Pour elle, enseigner, c’est avant tout une façon de faire vivre et de faire rayonner le ca trù”, témoigne-t-elle.

“J’ai une profonde admiration pour Madame Vân Mai. Elle n’a jamais suivi de formation, personne ne lui a appris, et pourtant elle a réussi à chanter par elle-même, avec un talent exceptionnel. Elle est toujours prête à enseigner le ca trù à ceux qui souhaitent l’apprendre, avec une grande patience et beaucoup de générosité”, partage Truc Linh, une autre membre du club de ca trù “Bích Câu Đạo Quán”.

Vân Mai, gardienne des rythmes du ca trù - ảnh 3L’artiste émérite Vân Mai, accompagnée des membres du club "Bích Câu Đạo Quán", participe au 4ᵉ Festival de ca trù de Hanoï en 2025. Photo : Kim Liễu/VOV5

Un temps tombé dans l’oubli, un son d’autrefois résonne à nouveau au cœur de la capitale moderne, porté par la passion et l’engagement de ceux qui font vivre la culture traditionnelle, à l’image de l’artiste émérite Vân Mai.

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