Le bonze
Thich Chon Nguyên a 39 ans. C’est grâce à lui que les enfants de notre fameux
village lacustre peuvent, le cas échéant, suivre ou continuer à suivre des
cours. Sa classe se trouve au beau milieu du village, c'est-à-dire sur un
radeau. A cette particularité près, on y enseigne tout ce qui s’enseigne
d’ordinaire dans une classe, à commencer par la lecture et l’écriture.
Nguyên Thi
Huê a 18 ans. Elle sait à peine lire. Elle est la plus âgée du groupe, ce qui
fait qu’elle assimile tout de même beaucoup plus vite que les plus jeunes de
ses condisciples, qui ont 6-7 ans.
« Je
suis très heureuse de suivre ces cours », nous dit-elle. « Ici,
j’apprends non seulement à lire et à écrire, mais aussi plein d’autres choses
qui ont trait à la vie de tous les jours. Par exemple, après les repas, j’avais
l’habitude de jeter toutes les ordures dans l’eau. Eh bien grâce au professeur,
je sais qu’il ne faut pas le faire. »
Effectivement,
le bonze s’emploie à donner à ses élèves des règles d’hygiène élémentaires, qui
sont bien trop souvent ignorées dans le village. Du coup, les enfants ne
jettent plus leurs ordures n’importe où et n’importe quand, ce qui constitue incontestablement
un progrès. Autre point important, ils ont leurs trois repas quotidiens sur
cette petite école lacustre, repas offerts par le bonze lui-même, assortis de
lait.
Au début, la
classe ne comptait que cinq élèves. Mais petit à petit, les villageois ont
commencé à s’y intéresser, et pas que les enfants. Sur la trentaine d’élèves
que reçoit le bonze, on trouve des quinquagénaires ou des sexagénaires. Comme
quoi, il n’y a pas d’âge !... Les
villageois ont cotisé, et avec l’argent des donateurs, ils ont acheté ce radeau
pour le transformer en une classe plus ou moins correcte.
« Le bonze aime beaucoup les enfants, ce
qui nous rend tous très heureux. J’espère que grâce à ses cours, nos enfants
pourront trouver du travail », nous confie Nguyên Thi Nga, 60 ans.
Thich Chon
Nguyên vient de Hô Chi Minh-ville. Il y a de cela 8 ans, il a été envoyé dans le
village 5 de la commune de Thanh Son pour y
ouvrir une pagode. Très vite, il s’est rendu compte que les enfants avaient
besoin que l’on fasse quelque chose pour eux. Aussi a-t-il décidé d’ouvrir
cette école pas comme les autres.
« Je
leur apprends à lire et à écrire, mais aussi à bien se comporter dans
l’existence. J’aimerais aussi pouvoir contacter des chefs d’entreprises pour
qu’ils les embauchent. Certes, c’est difficile, mais c’est indispensable pour
leur avenir », nous explique-t-il.
Comme les
radeaux flottent sur le lac, leur position n’est pas fixe. Mais celui qui
accueille la classe se situe toujours au milieu du village. Pour les
villageois, c’est non seulement un repère, mais surtout un formidable signe
d’espoir pour leurs enfants qui savent nager avant de savoir lire ou
écrire.