Un documentaire vietnamien en lice pour les Oscars 2023

Anh Tuân
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(VOVWORLD) -  L'Académie des Oscars a publié fin décembre 2022 la liste des longs métrages documentaires proposés pour la 95e édition… Nhung dua tre trong suong  (Enfants de la brume), de Ha Lê Diêm, figure parmi les 15 oeuvres nominées. Premier film vietnamien à pouvoir prétendre ainsi remporter l’un des plus prestigieux prix qui soient au monde, Nhung dua tre trong suong  en a déjà remporté un bon nombre… 

Un documentaire vietnamien en lice pour les Oscars 2023 - ảnh 1Poster du film. Photo: Fanpage Children of the Mist

Nhung dua tre trong suong nous raconte l’histoire de Di, une fille de 12 ans issue de l'ethnie Mong, qui vit dans les montagnes embrumées de Sa Pa, dans le Nord-Ouest du Vietnam. Les filles Mong se marient très jeunes, et en guise d’enterrement de leur vie de jeune fille, elles ont droit au «rapt de la mariée», qui a lieu en général au moment du Nouvel An lunaire. 

D'une durée de près de 100 minutes, le documentaire de Ha Lê Diêm nous parle du choc inévitable auquel sont confrontés des enfants qui vivent dans un environnement encore très traditionnel, très archaïque à bien des égards, tout en étant confrontés au monde moderne qu’ils ne peuvent pas ignorer… Ce choc, c’est celui que doit vivre et surmonter Di, la jeune protagoniste du film, qui est à l’image de ses consoeurs: déchirée entre tradition et modernité.   

La réalisatrice Marya E. Gates a écrit, à propos de ce film, qu’il semait les graines  de l'avenir auquel aspire Di… Un avenir que la jeune fille ne peut se promettre ni à elle-même, ni au public...  Cela étant, ce film n’est pas un jugement porté sur la tradition d’une communauté ethnique, il ne fait qu’aborder un sujet sous plusieurs facettes, a-t-elle ajouté.

Un documentaire vietnamien en lice pour les Oscars 2023 - ảnh 2La réalisatrice Ha Lê Diêm. Photo fournie par elle-même

Le film a été tourné par Ha Lê Diêm elle-même, pendant 3 ans et demi, entre 2017 et 2020, dans les environs de Sa Pa. Ha Lê Diêm, elle, est aussi une minoritaire ethnique, une Tày.

«Pour tourner ce film, j’ai dû me rendre à Sa Pa 5 ou 6 fois par an, à des moments différents: avant et après le Nouvel An lunaire, pendant les vacances d'été et la récolte du riz... Le séjour le plus long a duré un mois. Mais même pendant mon plus long séjour, je n’ai pu filmer que pendant 5 ou 6 jours, et encore, pas la journée entière. Souvent, le tournage ne se faisait que le matin, l'après-midi ou le soir», nous raconte-t-elle.

Avant d’être nominé aux Oscars 2023, Nhung dua tre trong suong  a remporté de nombreux prix internationaux prestigieux. On peut citer, entre autres, le prix du «Meilleur réalisateur» et un prix spécial du jury dans la catégorie «première œuvre» au Festival international du film documentaire d'Amsterdam en 2021, le prix du «Meilleur film documentaire d'Asie du Sud-Est» au Festival du film de Balimakarya, en Indonésie et le Grand Prix du Festival international du film d’éducation en France... 

«Les réalisateurs de documentaires établissent parfois une relation étroite avec leurs personnages, ce qui peut interférer avec leur rôle de réalisateur. Mais cette réalisatrice, dans sa première œuvre, est parvenue à trouver un équilibre, séparant ses sentiments de l'histoire touchante d'une fille Mong coincée entre l’enfance et l'âge adulte et entre la tradition et la modernité, dans une campagne reculée du Vietnam», ont noté les membres du jury du festival d’Amsterdam, le plus important festival de film documentaire du monde.

Le fait est que Ha Lê Diêm a passé plusieurs jours avec Di, sa famille et ses amis.

«J’ai utilisé une seule caméra. Je suis allée à la fête du printemps avec Di et ses amis, parfois toute la journée et j’ai parcouru jusqu'à 40 ou 50 kilomètres par jour avec une petite somme d'argent en poche et deux batteries pour ma caméra», se souvient-elle.

Le tournage a donc été aventureux, mais le montage a lui aussi été ardu, comme le reconnaît bien volontiers la réalisatrice…  

«Après près de 3 ans et demi, j'avais 100 heures d’images brutes. J’ai ensuite choisi environ 50 ou 60 heures pour traduire les conversations de la langue Mong en vietnamien et en anglais, puis coupé encore une fois. Il y avait des choses que je n'avais jamais faites, ni moi, ni mes assistants, comme rédiger des contrats, travailler avec des producteurs, des distributeurs… », nous explique-t-elle. 

Révélée par son premier documentaire, Hà Lê Diêm se perfectionne sans cesse. Elle a participé à de nombreux ateliers et à de nombreux festivals de films internationaux pour acquérir des expériences.

Issue de l’ethnie Tày, plus que quiconque, elle comprend parfaitement bien les défis auxquels sont confrontées les jeunes filles vivant dans les montagnes reculées. Et en tant que réalisatrice, elle n'est pas seulement une narratrice, mais aussi une compagne de son personnage...

 

 

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