Vietnam-Maroc: un attachement profond et un avenir prometteur en commun

Duc Quy
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(VOVWORLD) - Il y a 60 ans, le Vietnam et le Maroc décidaient de concrétiser leurs liens étroits par l’établissement de relations diplomatiques. C’était le 27 mars 1961.

Dans une interview accordée à la Voix du Vietnam, Jamale Chouaibi, l’ambassadeur du Maroc au Vietnam, nous apporte non seulement plus de précisions sur l’attachement qui unit nos deux pays, mais aussi sur l’avenir du partenariat bilatéral.


Vietnam-Maroc: un attachement profond et un avenir prometteur en commun - ảnh 1Jamale Chouaibi, l’ambassadeur du Maroc au Vietnam. Photo: Duc Quy/VOV5

Les relations entre le Maroc et le Vietnam remontent aux années 1940, lorsque le Maroc menait la lutte pour son indépendance contre les puissances coloniales françaises et espagnoles. Nombre d’historiens affirment l’existence de contacts entre des leaders de la Résistance marocaine et le Président Hô Chi Minh afin d’inciter les troupes nord-africaines qui faisaient partie du corps expéditionnaire français à se démobiliser ou à rallier les rangs de la résistance vietnamienne.

Parmi les figures emblématiques envoyées par le Maroc auprès du Viêt Minh à cette fin, on peut citer M’Hammed ben Omar Lahrech. Surnommé Maârouf - Anh Ma de son nom de guerre vietnamien -, Ben Omar s’occupait des soldats nord-africains ralliés ou prisonniers dans le camp de Son Tây au pied du mont Ba Vi. Il avait obtenu le grade de général et entretenait des relations très étroites avec les dirigeants vietnamiens de l’époque.

La Porte du Maroc, qui a été construite par des Marocains à Ba Vi constitue un legs et un témoignage éclatant de cette histoire partagée entre le Maroc et le Vietnam.

Les relations entre le Maroc et le Vietnam ont connu d’importants développements positifs ces dernières années, avec une augmentation des visites de délégations gouvernementales et parlementaires de haut niveau, et notamment la visite au Maroc de la présidente de l’Assemblée Nationale, Nguyen Thi Kim Ngân, en mars 2019, et celle du président de la Chambre des Représentants du Parlement marocain, Habib El Malki, au Vietnam, en décembre 2017.

Nos deux pays ont la volonté commune de promouvoir et de consolider une coopération Sud-Sud à même de répondre aux défis économiques, politiques, sociaux et environnementaux globaux, principalement à travers le partage d’expériences et de bonnes pratiques, et la promotion de savoir et de l’expertise entre pays en voie de développement.

Au niveau politique, le Maroc et le Vietnam partagent plusieurs principes fondamentaux dans la conduite de leurs relations extérieures, notamment le respect de la souveraineté et de l’intégrité territoriale, la non-ingérence dans les affaires intérieures des Etats, la promotion de la paix, de la stabilité et du développement, et l’attachement au principe de règlement des différends à travers le dialogue, la médiation et la négociation.

Au niveau économique, le développement positif de la coopération bilatérale se traduit par une augmentation des échanges commerciaux de près de 50% entre 2015 et 2019, avec le Vietnam, qui est aujourd’hui le 2e place des partenaires commerciaux du Maroc au sein de l’ASEAN.

La coopération bilatérale s’articule autour de quels piliers?

La coopération bilatérale entre le Maroc et le Vietnam englobe trois piliers : politique, économique et culturel. Des consultations politiques ont lieu régulièrement, ainsi que des consultations sectorielles dans le cadre des commissions mixtes, dont la prochaine est prévue en novembre prochain à Rabat.

Plusieurs accords ont été signés dernièrement, portant sur la coopération parlementaire, économique, interuniversitaire ainsi que sur les échanges de personnels et  la coopération décentralisée à travers le jumelage entre villes des deux pays.

L’accord commercial signé récemment entre le ministère vietnamien de l’Industrie et du Commerce, et le ministère de l’Industrie, de l’Investissement, du Commerce et de l’Économie digitale du Royaume, a pour objectif de promouvoir la coopération dans divers domaines, tels que les énergies renouvelables, le textile, le prêt à porter, l’électronique, la mécanique, les industries chimiques, et la production de fertilisants.

Sinon, le mémorandum d’entente signé récemment entre les deux départements chargés du commerce a établi un sous-comité sur la coopération en matière de commerce et d’industrie, qui a pour mission de promouvoir le commerce bilatéral et soutenir les petites et moyennes entreprises.

Étant donné que les deux pays ont lancé des stratégies sectorielles très ambitieuses, il serait temps qu’ils procèdent à l’établissement de comités conjoints sectoriels portant sur leurs domaines d’excellence, tels que l’industrie, les énergies renouvelables, la pêche, le tourisme et les technologies de l’information.  

Les nombreuses similitudes qui existent entre le Maroc et le Vietnam favorisent une coopération et une coordination plus poussées à l’avenir. Les deux pays ont en effet en commun une position géostratégique de porte d’entrée : en Afrique et en Europe, pour le Maroc, et en Asie du Sud-est, pour le Vietnam. Ce sont des économies émergentes dynamiques, à la croissance économique soutenue, qui promeuvent des politiques de diversification des partenaires commerciaux et des ressources humaines.

Avec sa position stratégique, le Maroc sert de passerelle entre le Vietnam et le continent africain. À votre avis, qu’est-ce que le Vietnam doit faire pour entrer dans ce marché prometteur?

Le Maroc, grâce à la vision éclairée de Sa Majesté le Roi, a placé l’Afrique au cœur de sa politique étrangère. L’Afrique est le prolongement naturel et la profondeur stratégique du Royaume.

De ce fait, le Maroc a adopté une approche diplomatique stratégique ayant pour principal objectif d’établir des modèles de développement à forte dimension humaine avec une multitude de pays africains, selon les concepts de co-développement et de solidarité Sud-Sud. 

Aujourd’hui le Maroc est le premier investisseur en Afrique de l’Ouest, et 2e plus investisseur au niveau du continent. Une présence substantielle en Afrique, dans des secteurs d’activité vitaux tels que les assurances, la banque, les énergies et les télécommunications, permet au Maroc de se positionner en tant que plateforme pour les compagnies étrangères intéressées par le continent africain.

L’action du Maroc en Afrique se décline également à travers divers partenariats et programmes de renforcement des capacités dans des secteurs clé tels que la gestion des ressources hydriques, l’assainissement, les douanes, la gestion des aéroports, etc…

La «Casablanca Finance City» (CFC) est devenue un centre économique et financier du marché de l’Afrique francophone, et plusieurs multinationales de renommée internationale qui avaient établi des unités de production au Maroc ont pu ensuite étendre leurs activités en Afrique.

Le Vietnam focalise sa stratégie future sur l’expansion et la diversification de son réseau partenarial économique au-delà de ses partenaires traditionnels en Afrique australe. L’Afrique de l’Est et l’Afrique de l’Ouest devraient constituer les prochaines cibles de son action économique et commerciale. 

Le Vietnam peut compter sur le Maroc pour faciliter l’adossement des entreprises vietnamiennes sur les entreprises marocaines en vue d’un accès aisé et sécurisé aux marchés locaux et régionaux africains, et ce eu égard à l’expérience cumulée par le Royaume dans la conduite d’affaires et la réalisation de projets divers en Afrique.

Les deux pays pourraient aussi initier conjointement des actions tripartites ou quadripartites à l’adresse de pays africains notamment dans le domaine agricole avec l’implication de bailleurs de fonds internationaux,

Le Maroc est le premier pays africain qui participe à la «Mekong River Commission», et ce depuis 2017. Quels sont les projets les plus marquants qui ont été lancés par votre pays pour contribuer au développement et à la protection des pays riverains de ce fleuve ?

L’engagement du Maroc, en tant que partenaire de développement de la MRC, s’inscrit en droite ligne de la stratégie qui consiste à une ouverture sur les pays de l’ASEAN conformément à la volonté de Sa Majesté le Roi Mohammed VI de diversifier les partenaires économiques du Royaume.

Le mémorandum d’entente signé en 2017 et les projets de coopération identifiés suite à la visite au Maroc d’une délégation de la MRC portent tous sur des secteurs prioritaires pour ce groupement sous régional.

Aujourd’hui, cette coopération touche principalement aux domaines de la gestion des ressources hydriques, des énergies renouvelables et de l’écotourisme, mais aussi sur l’atténuation des effets de la sécheresse, et la gestion des ressources aquatiques.

Dans le cadre de cette coopération, des formations spécialisées en matière de systèmes d’irrigation «goutte-à-goutte» au profit d’experts du Cambodge, du Laos, de la Thaïlande et du Vietnam ont été retenues.

Le Maroc est disposé à soutenir la Mekong River Commission dans l’évaluation du potentiel des énergies renouvelables dans la région du bassin du Mékong, ainsi qu’en matière de conservation de la biodiversité et de développement durable.

Vietnam-Maroc: un attachement profond et un avenir prometteur en commun - ảnh 2L’ambassadeur du Maroc au Vietnam Jamale Chouaibi et la présidente de l'Assemblée nationale du Vietnam Nguyên Thi Kim Ngân (centre) lors de la cérémonie d'admission d'observateurs de l’Assemblée interparlementaire de l’ASEAN 2021 (AIPA 21). Photo: Ambassade du Maroc au Vietnam

Le Maroc est également un des pays signataires de l’Accord d’amitié et de coopération de l’ASEAN. Que pensez-vous des actions menées par le Vietnam en tant que Président de l’ASEAN en 2020?

L’adhésion à l’Accord d’amitié et de coopération de l’ASEAN témoigne de l’intérêt porté par le Maroc à la promotion de la paix, de l’amitié et de la coopération, qui constituent le fondement des relations entre les pays signataires de ce traité de non-agression, pour une paix et un développement durables.

Les observateurs ont été unanimes quant au succès de la présidence vietnamienne de l’ASEAN en 2020, dans un contexte de pandémie particulièrement contraignant.

Le Vietnam a réussi à faire avancer le groupe et à atteindre les objectifs fixés malgré la crise sanitaire, et a su transformer les défis en opportunités de manière à renforcer la cohésion de l’ASEAN ainsi que l’esprit de solidarité qui caractérise cette organisation régionale.

En tant que membre du GADIF - le Groupe des ambassadeurs, délégations et institutions francophones au Vietnam -, pourriez-vous nous dire quels sont les actions communes que pourraient développer le Vietnam et le Maroc dans le cadre de la Francophonie?

L’ambassade du Maroc participe régulièrement aux différentes activités organisées par l’OIF et ses institutions connexes à savoir l’Agence Universitaire de la Francophonie et l’Institut Francophone International.

En 2020, l’ambassade a participé à plusieurs évènements notamment les Franconomics où elle a animé un atelier portant sur le tourisme au Maroc, et un autre évènement sous le thème les couleurs Francophones organisé à la Faculté des Langues et Études Internationales relevant de l’Université Nationale de Hanoi.

L’ambassade compte aussi parmi les sponsors réguliers du concours Jeunes Reporters, organisé annuellement par le Courrier du Vietnam.

Chaque année le Maroc offre 10 bourses d’étude à des étudiants vietnamiens francophones. Cette offre est-elle maintenue malgré la crise sanitaire?

En effet, le Royaume du Maroc offre 10 bourses d’étude annuellement au profit d’étudiants vietnamiens francophones dans diverses disciplines. Cette offre a été maintenue pour l’année académique 2020-2021. En raison des restrictions imposées par la pandémie, il a été procédé à l’adoption de l’enseignement à distance comme modèle pédagogique pour ces étudiants en attendant le retour à la vie normale et la reprise des cours en présentiel.

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