Nuit des idées : le bien et le mal

Hoa Ha
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(VOVworld) - Qu’est-ce qui est bien ?  Qu’est-ce qui est mal ? Suis-je bon ? Suis-je mauvais ? Suis-je les deux ? Qu’est ce qui était considéré comme bon et mauvais avant ? Qu’est ce qui l’est aujourd’hui ? Y-a-t-il une différence ? Des artistes  vietnamiens et français ont essayé de réfléchir sur ces notions fondamentales lors de la première Nuit des idées au Vietnam, organisée récemment à l’Institut français de Hanoi. 

(VOVworld) - Qu’est-ce qui est bien ?  Qu’est-ce qui est mal ? Suis-je bon ? Suis-je mauvais ? Suis-je les deux ? Qu’est ce qui était considéré comme bon et mauvais avant ? Qu’est ce qui l’est aujourd’hui ? Y-a-t-il une différence ? Des artistes  vietnamiens et français ont essayé de réfléchir sur ces notions fondamentales lors de la première Nuit des idées au Vietnam, organisée récemment à l’Institut français de Hanoi. 

Nuit des idées : le bien et le mal - ảnh 1
Photos : Nha Nam

Vous n’êtes ni dans une salle de spectacle, ni dans une salle de conférence, ni dans un amphithéâtre, mais dans un café, un café philo, un endroit où on échange des idées. Partout dans le monde, en ce moment même, et pendant toute la deuxième quinzaine de janvier, les Institut français organisent une nuit des idées qui consiste à inviter des scientifiques, des auteurs, des artistes à débattre sur des sujets qui préoccupent notre société contemporaine. Le thème choisi pour cette première Nuit des idées au Vietnam : le bien et le mal.

Colas Duflo, professeur à l’Université de Paris Ouest Nanterre La Défense, aborde d’abord, à travers la philosophie et la littérature, l’histoire de la pensée morale du 18ème siècle et le sens du message des Lumières, aujourd’hui :

« On peut dire qu’il y a deux traditions sur le bien et le mal. L’une pense qu’il y a du bien et du mal en soi, indépendamment de nous, et donc c’est du bien et du mal absolus, devant quoi tout doit céder. La première tradition se trouverait, par exemple, chez Platon et dans la pensée qui en découle, le bien existe, il est du côté de l’être, de Dieu, il est comme le soleil qui donne vie et qui fait couler sa lumière sur nous, et nous devons nous tourner vers lui. Et le mal aussi. On voit très bien comment cette tradition donne lieu à toute une culture, dans la littérature et dans les arts. A cette tradition dominante dans la culture occidentale, va s’opposer une tradition qu’on peut appeler relativiste. Cette thèse est formulée de manière fameuse par Spinoza, au milieu du 17ème siècle, selon lui, bien et mal ne sont pas des choses qui existeraient en soi ou des propriétés objectives des choses, mais toujours des rapports, des relations que nous formons, des comparaisons que nous faisons. Cette thèse est en rupture avec la pensée chrétienne et va cependant largement circuler, se diffuser de manière plus ou moins clandestine, notamment au 18ème siècle, le siècle des Lumières. Il y a une laïcisation des débats moraux, au sens où de plus en plus de gens admettent que ça n’est pas aux églises instituées de détenir le monopole des valeurs morales, mais c’est l’humanité qui produit des valeurs en fonction de ses besoins. Cette pensée est diffusée dans toute la société qui lit, et c’est cette part de la population qui va fabriquer l’idéologie, qui accompagne la Révolution française. Alors en quoi ça nous donne à penser aujourd’hui ? C’est une leçon qui est, fondamentalement, de tolérance, personne ne devrait pouvoir maltraiter la société au nom de la valeur absolue qui serait supérieure à la société. »

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Tran Ngoc Hieu, docteur en littérature, professeur à l’Ecole Normale Supérieure, s’intéresse, quant à lui, à cette question à travers la littérature vietnamienne contemporaine :

« A l’époque de la littérature révolutionnaire, il y avait une distinction très claire entre le bien et le mal, tandis qu’à l’époque post-guerre, les écrivains ont eu le  courage de parler du mal, du mal existant dans notre propre société.  C’est pour cette audace que la littérature nous touche. Plus je lis, plus je m’aperçois que la littérature est différente de la religion ou la morale, elle ne nous console pas. Plus je lis, plus je trouve que le bien est moins intéressant pour l’homme. Le bien est souvent seul. La littérature se penche plus sur le mal que sur le bien. Le mal rend l’homme mystérieux et compliqué. Les questions liées au mal nous obligent à réfléchir sur notre vie, nos peines, notre foi. Il me semble que le bien échoue facilement, et que c’est le mal le moteur du changement. La littérature comble le vide, circonscrit notre instinct du  mal. Elle nous permet de voir que rien n’est plus précieux que la liberté, et qu’il nous faut être responsable pour affronter  le monde où, comme M. Dulo vient de le dire, rien n’est absolu. »

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Dang Hoang Giang, auteur et activiste social, aborde la question d’un point de vue plus socio-psychologique et s’intéresse à la notion de relativité du bien et du mal selon les époques, les lieux, les cultures :

« Pourquoi est on méchant ? C’est une question qui est très vaste. D’après ce que j’ai lu, plusieurs explications peuvent être données.  D’abord il y a la superstition et la conviction d’être représentant de la bonne foi,  du bien absolu, avec la mission de vaincre à tout prix le mal. Deuxièmement, c’est la soumission à l’autorité, et cette notion renvoie à ce qui a été dit par M. Duflo et M. Hieu. Le bien et le mal coexistent dans notre cœur mais  sous l’impulsion du pouvoir, le mal peut être attisé.  Pourquoi devient-on cruel ? Parce que le Moi a été attaqué. Cet état entraîne des changements psychologiques, dont notamment la dégradation de la personne humaine. Alors comment doit-on se comporter face à la méchanceté ? Il faut d’abord réprimer le mal qui existe dans notre cœur. Il ne faut pas se soumettre à l’autorité de manière aveugle, il faut garder  son libre arbitre et surtout avoir de l’empathie, se mettre à la place d’autrui. »

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Le dernier éclairage vient de Ta Huy Long, peintre - illustrateur aux éditions Kim Dong. Comment, dans un livre pour enfant, va-t-on dessiner le bien et le mal ?

« Pour moi, le bien et le mal est indissociables, mais quand on dessine pour les enfants, ces deux notions doivent être clairement distinctes. Les héros, qui représentent le bien, ont tous une beauté épique. A l’inverse, les mauvais personnages doivent être caricaturés pour qu’on reconnaisse immédiatement leur caractère. Moi je pense que dessiner le mal est beaucoup plus facile, car il est très varié. Quand je peins le mal, je satisfais un part de mal dans moi-même. »

Pendant plus de deux heures, les participants ont débattu de façon enthousiaste sur le bien et le mal, sur le bien ou le mal. Cette soirée, comme celles qui ont eu lieu à Tokyo, à Mendosa, à New York, à Madrid… seront toutes en libre accès sur le site www.lanuitdesidees.com. Allez les écouter, pour participer un peu à cet échange d’idées planétaire.

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