Le chercheur et peintre Phan Cẩm Thượng. Photo: HanoiTV |
Si Phan Cẩm Thượng a choisi cette période de 100 ans, c’est parce pour la société et la population vietnamiennes, c’est une période de mutation. Mutation sur le plan politique, tout d’abord, avec cette confrontation entre les derniers souverains de la dynastie des Nguyen et le pouvoir colonial. Mais mutation sur le plan social aussi, avec un exode rural qui provoque une très sérieuse remise en question des coutumes villageoises.
"En 2011, j’avais publié un livre intitulé «La civilisation matérielle des Vietnamiens» qui traite d’objets du quotidien tels que les outils agricoles, les instruments de musique, nous rappelle Phan Cẩm Thượng. Dans ce deuxième livre, je m’intéresse davantage aux coutumes des agriculteurs vietnamiens des 19ème et 20ème siècles. Matérialité et spiritualité vont toujours de pair. Après ce premier livre sur le côté matériel, celui-ci parle du mode de vie quotidien, des rites religieux, des funérailles, des mariages… Ces coutumes ne relèvent ni de la loi ni du code villageois. Ce sont des habitudes qui ont une vie, c’est-à-dire qu’elles naissent, évoluent et meurent."
Photo: Phunuonline |
En 600 pages divisées en six chapitres, Phan Cam Thuong allie contes et études, décrivant la vie de personnes simples, sincères, modérées, respectueuses de la hiérarchie.
"A la différence de mes précédents livres, celui-ci ne répertorie, ni n’énumère les coutumes, nous dit-il. Je me suis focalisé sur deux pratiques qui à mon sens sont les plus représentatives, à savoir les pratiques funéraires et nuptiales. Je les ai étudiées profondément pour voir quelles sont leurs significations, comment elles évoluent dans le temps et ce qui les fait changer. En fait, j’ai voulu parler des gens, de la façon dont les coutumes impactent leur existence et leur futur.»
Pour aider ses lecteurs à comprendre les origines de ces pratiques anciennes, dont certaines sont encore en vigueur, Phan Cam Thuong a utilisé une approche anthropologique.
"J’ai étudié les pratiques quotidiennes villageoises de différentes ethnies, pas seulement celles des Kinh. Chacune des 54 ethnies qui composent la nation dispose de pratiques qui lui sont propres, mais aussi de pratiques qui sont communes, sinon à toutes, au moins à quelques-unes d’entre elles. J’ai procédé à une analyse comparative des pratiques funéraires et nuptiales des Muong, des Thai noirs ou encore des Tay qui sont des communautés ethniques importantes du pays", nous explique-t-il.
Avec son écriture simple, «Les coutumes d’une vie» de Phan Cam Thuong est salué par de nombreux critiques comme étant un livre d’histoire dans lequel la «majorité du peuple» prend note de la façon dont il vit, échange, chante et aime. Mai Anh Tuan, l’un de ces critiques, estime que l’auteur a mis en évidence le fait que ce sont les paysans eux-mêmes qui préservent leur identité culturelle, et que leurs coutumes sont tellement solides qu’elles restent imperméables à toute idéologie, à toute culture étrangère. De son côté, l’écrivain Nguyen Ngoc compare ce livre à des annales du quotidien du Vietnamien.
«Les coutumes d’une vie» est le deuxième livre d’un recueil de quatre livres consacré à la civilisation vietnamienne de Phan Cam Thuong. Les prochains devraient voir le jour en 2020 et 2022, portant respectivement sur les régions et sur le changement de la société vietnamienne au 19ème siècle.