A Binh Dinh comme dans huit autres provinces
du Centre Vietnam, le bài chòi est une activité culturelle indispensable,
répondant aux besoins de distraction et de manifestation artistique de la
population. Ces chants expriment l’amour du pays et l’attachement à la
communauté. Ils comportent également des leçons morales et des expériences à
partager.
«Je chante depuis
toute petite des paroles comme ceci ‘maman, que je te raconte, c’est moi qui ai
cherché les légumes, les escargots pour nourrir mon mari, pour qu’il puisse
participer au concours mandarinal. Et aujourd’hui, je suis si heureuse
d’entendre la bonne nouvelle.’», dit Lê Thi Dào, une chanteuse chevronnée de Binh Dinh.
Les paroles du bài chòi sont écrites dans un
langage familier. Les habitants les connaissent par cœur, ces paroles qui
décrivent leur passion pour cet art: «Allez on va jouer au bài chòi, tant pis
pour les petits qui pleurent jusqu’à ce que leur nombril sorte du ventre» ou
«on accepterait bien de manger des trucs infectieux, mais nos oreilles doivent
absolument pouvoir entendre du bài chòi»…
«Dans le bài chòi,
il n’y a pas vraiment de maître de chant. Les chanteurs viennent de la campagne», explique Nguyên Kiêm, ancien chef de la
troupe de bài chòi de Binh Dinh. «Un
spectacle comprend quatre ou cinq chanteurs. Si nous oublions des paroles, les
spectateurs nous les rappelleront. C’est un art du peuple qui aurait disparu
depuis longtemps sans les efforts de préservation qui ont été faits.»
Depuis quelques années, le bài chòi a
retrouvé ses lettres de noblesse. A Binh Dinh, les fêtes, jeux et spectacles
ayant trait à cet art se multiplient. Tout récemment, un concours a été
organisé dans les collèges, attirant des centaines d’élèves.
«Au début, ça ne
m’intéressait pas beaucoup, mais plus je répète, plus je prends goût au bài
chòi. Les concours comme celui-ci sont nécessaires pour nous faire connaître
les traditions populaires», raconte Lê Phuong Hoàng Diêu, une des participantes.
Les autorités de la province de Binh Dinh
réfléchissent depuis longtemps sur les moyens de préserver le bài chòi. Pour
Nguyên An Pha, président de l’association provinciale des lettres et des arts,
il faut d’abord aider les villages à maintenir les activités communautaires
impliquant cet art folklorique.
«L’essentiel
serait de préserver le bài chòi sous ses formes les plus populaires. Autrement
dit, il faut aider les habitants à organiser jeux, spectacles et concours de
bài chòi. Quant au bài chòi professionnel, c’est à l’Etat de faire des
efforts pour le préserver.», estime-t-il.
Lors de la réception du certificat de
l’Unesco, le ministère de la Culture, des Sports et du Tourisme a publié un
plan d’action national sur la préservation et la valorisation du bài chòi. Le
Premier ministre Nguyên Xuân Phuc s’est personnellement engagé à participer à
la mise en œuvre de ce plan d’action. Mais ce sont les autorités locales et les
populations concernées qui joueront le rôle principal. C’est de leur patrimoine
qu’il s’agit.