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L’accord a été obtenu à l’issue de deux journées de discussions à Genève, les 10 et 11 mai. Les pourparlers ont réuni, côté américain, le secrétaire au Trésor Scott Bessent et le représentant au Commerce Jamieson Greer, tandis que la délégation chinoise était conduite par le vice-Premier ministre He Lifeng.
Une trêve douanière après des négociations intensives
Les deux parties ont convenu d’un gel partiel des mesures tarifaires en vigueur. Washington réduit à 10% les droits de douane sur un ensemble de produits chinois, contre 125% auparavant. Un prélèvement additionnel de 20% reste toutefois en vigueur sur les marchandises liées au fentanyl, portant le taux global maintenu à 30%.
De son côté, Pékin supprime une large part de ses tarifs, ramenés à un taux unique de 10%, et s’engage à lever certaines barrières non tarifaires appliquées aux produits américains depuis le 2 avril. Les mesures doivent entrer en application le 14 mai pour une période initiale de 90 jours.
Cet accord a été salué comme une avancée notable, en particulier au vu du ton tendu qui caractérisait les relations bilatérales ces derniers mois. Dans une déclaration conjointe, les deux gouvernements ont reconnu l’importance stratégique de leurs liens économiques, soulignant leur volonté commune de bâtir une relation «durable, stable et mutuellement bénéfique», tant pour leur propre développement que pour l'économie mondiale.
"Le fait que nous ayons pu mener et conclure rapidement ces discussions témoigne de la compréhension mutuelle et du respect entre les parties américaine et chinoise", a déclaré Jamieson Greer, représentant au Commerce américain.
La détente a été largement saluée par les partenaires commerciaux des deux pays. Le Commissaire européen à l’Économie, à la Productivité, à la Mise en œuvre et à la Simplification, Valdis Dombrovkis, a estimé que l'accord américano-chinois profiterait également à l’Union européenne:
"La réduction des tensions commerciales entre les États-Unis et la Chine est évidemment un pas dans la bonne direction. Cela atténue les risques de détournement commercial vers d’autres marchés, y compris le marché européen", a-t-il noté.
Vers un apaisement durable?
Les marchés financiers ont également réagi positivement: l’indice S&P 500 a bondi de 3,3% à Wall Street, tandis que les prévisions de croissance ont été revues à la hausse pour l’économie chinoise. JP Morgan prévoit désormais un PIB en hausse de 4,8% pour 2025, contre 4,1% auparavant.
Si l’accord entre Washington et Pékin a temporairement rassuré les marchés, les économistes restent prudents quant à ses effets à long terme. Selon eux, la confiance des investisseurs a certes été partiellement restaurée, mais l’horizon économique demeure incertain. Le commissaire européen à l’Économie, Valdis Dombrovkis, alerte notamment sur le maintien d’un taux de 30% sur certains produits chinois durant les 90 jours de trêve — un niveau jugé «très élevé», susceptible de provoquer de nouveaux détournements commerciaux au détriment d’autres partenaires.
Marcus Noland, vice-président exécutif de l’Institut Peterson à Washington, estime pour sa part que l’accord pourrait être prolongé au-delà des 90 jours prévus, dans l’espoir de parvenir à des compromis plus durables.
«Le président Donald Trump envisage actuellement d’imposer de nouveaux droits de douane, notamment sur les produits pharmaceutiques, dont une large part est importée de Chine et d’Inde. Si ces mesures sont mises en œuvre, les tarifs pourraient à nouveau grimper et relancer les frictions commerciales», avertit M. Noland.
Justin Wolfers, économiste à l’Université du Michigan, rappelle que d’autres secteurs – automobiles, acier, aluminium – restent frappés par des droits additionnels de 25%. Ces tarifs, ajoutés au taux de base de 10% que Donald Trump est déterminé à maintenir avec tous les partenaires, y compris le Royaume-Uni, avec lequel un accord commercial vient d’être conclu, signifient que de nombreux produits importés aux États-Unis — et pas seulement les marchandises chinoises — continueront à long terme à être soumis à des droits de douane de 30% ou plus.
Ces tarifs représentent toujours un coût significatif, tant pour les entreprises que pour les consommateurs américains, ce qui pourrait freiner les embauches et les investissements.
Alors qu’une nouvelle fenêtre de négociation s’ouvre, une question centrale demeure: les États-Unis et la Chine parviendront-ils à poser les bases d’un accord durable, ou cette trêve n’est-elle qu’un sursis dans un cycle plus large de confrontation commerciale? Les 90 prochains jours seront décisifs pour l’avenir des relations économiques entre les deux puissances.