Agent orange: le combat se poursuivra

Thu Hoa
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(VOVWORLD) - La décision vient de tomber. Le tribunal d'Évry a jugé irrecevables les demandes de la Française d’origine vietnamienne Trân Tô Nga qui, en tant que victime de l’agent orange, poursuivait au civil 14 multinationales opérant dans l’agrochimie.
Agent orange: le combat se poursuivra - ảnh 1Trần Tô Nga (droite). Photo: Linh Huong/TTXVN

Les multinationales en question sont celles qui, durant la guerre du Vietnam, ont fourni à l’armée américaine ce fameux agent orange: un défoliant ultra toxique aux conséquences désastreuses, tant sur l’environnement que sur les êtres humains…

Dans son ensemble, la communauté internationale conteste cette décision de justice et soutient Trân Tô Nga, laquelle a fait appel.

Agent orange: le combat se poursuivra - ảnh 2Photo: TTXVN

Le tribunal a donc donné raison aux 14 multinationales incriminées, en considérant qu'elles avaient «agi sur ordre et pour le compte de l'État américain» et qu'elles pouvaient se prévaloir de «l'immunité de juridiction». Ce principe de droit international établit qu'aucun État souverain ne peut assujettir un autre État souverain à sa juridiction.

William Bourdon, Amélie Lefebre et Bertrand Repolt, les avocats du cabinet Bourdon & Associés qui défendent Trân Tô Nga depuis 10 ans, estiment que ce jugement du tribunal d'Évry a été rendu en vertu d’un principe obsolète «en contradiction avec les principes modernes du droit international».  

D’après eux, ces 14 entreprises «ont répondu à un appel d'offre» et n'ont donc pas agi sous la contrainte du gouvernement américain. En outre, «les préconisations posées par l'administration américaine n'imposaient pas de fabriquer un produit comportant un taux de dioxine aussi élevé que celui de l'agent orange», ont encore dénoncé les avocats du cabinet Bourdon dans un communiqué publié à la suite de la décision du tribunal.

De son côté, l’Association des victimes vietnamiennes de l’agent orange a promis de continuer à soutenir Trân Tô Nga dans sa quête de justice. Son président, le général Nguyên Van Rinh, s’est déclaré surpris qu’un tribunal français refuse d’accéder à la demande d’une ressortissante française en s’abritant derrière une «incompétence» contestable sur le fond comme sur la forme.

Il a en outre rappelé que les multinationales poursuivies par Trân Tô Nga l’étaient pour avoir fourni 80 millions de litres d’agent orange à l’armée américaine, se rendant ainsi responsables d’un désastre sanitaire et écologique sans précédent.   

Quant à Trân Tô Nga, qui est elle-même victime de l’agent orange, elle est bien évidemment déçue, mais nullement découragée puisqu’elle a fait appel. «Pendant toutes ces années, on a réussi à faire ressortir le passé», s’est-elle félicitée...

Le fait est que l’opinion internationale est très largement de son côté. Il suffit, pour s’en convaincre, de lire les articles qui lui ont été consacrés, à elle et à la cause qu’elle défend. Le 10 mai, soit le jour même de l’annonce du tribunal, le Parti communiste allemand DKP a publié une déclaration de soutien à Trân Tô Nga et prévenu qu’il continuerait à apporter des informations sur cette question de l’agent orange au Vietnam.

Même son de cloche du côté de Junge Welt, un journal allemand, qui a rappelé que l’armée américaine avait mené une véritable guerre chimique au Vietnam et que 4 millions de Vietnamiens en subissaient encore les conséquences… Tout en refusant de dédommager les victimes vietnamiennes, les États-Unis ont soigné et dédommagé les soldats américains ayant été exposés à ce produit toxique pendant la guerre, peut-on également lire.

D’autres journaux allemands comme Deustche Welle, Spiegel ou Focus ont rejoint ce concert de soutien à Trân Tô Nga, non sans noter que grâce à elle, ce drame de l’agent orange n’avait pas sombré dans l’oubli, comme cela eût été si commode…       

Ce procès est aussi historique que singulier. Trân Tô Nga est jusqu’à présent l’unique personne dans le monde susceptible de représenter les victimes vietnamiennes de l’agent orange, parce qu’elle seule répond aux trois conditions requises: être d’origine vietnamienne et de nationalité française; être domiciliée en France, l’unique pays au monde dont le droit national permet d’ouvrir des procès internationaux pour défendre ses ressortissants face à un autre État leur ayant porté préjudice; et enfin, être elle-même victime de l’agent orange.

En 2009, la Cour suprême des États-Unis avait jugé irrecevable la plainte de l’Association des victimes de l’agent orange du Vietnam contre 37 firmes chimiques américaines. Le recours de Trân Tô Nga à la justice française représente donc pour ces victimes un immense espoir.

Le combat n’est pas fini. En faisant appel, Trân Tô Nga a démontré aux yeux du monde entier qu’elle était bien décidée à aller jusqu’au bout…

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